Vidéo surveillance : le Conseil d’Etat dessine les contours de la protection des salariés.
Par Christèle Morand, avocat associé, Eole Avocats.
Pour être valable, un dispositif de surveillance des salariés doit être légitime et proportionné au but poursuivi, avoir été porté à la connaissance des salariés et les données collectées doivent être sécurisées.
Christèle Morand, avocat associé au sein du cabinet Eole Avocats, revient sur ces règles à la lumière d’une décision du Conseil d’Etat du 18 novembre 2015.
Christèle Morand est avocat associé au sein du cabinet Eole Avocats (Paris – Lyon – DOM).
Avocat depuis 2003, elle a collaboré précédemment au sein du cabinet Yramis Avocats et Fromont Briens & Associés. Elle intervient dans les domaines du droit du travail et de la protection sociale, tant en conseil qu’en contentieux, et collabore régulièrement en tant qu’expert-formateur pour Francis Lefebvre Formation.
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Comme d’autres technologies de contrôle déployées dans l’entreprise, la vidéosurveillance interfère nécessairement avec la sphère de la vie privée des salariés, et engendre à ce titre pour l’employeur des obligations et contraintes juridiques, dont force est de constater qu’elles sont loin encore d’être maîtrisées.
Or, s’il est admis de longue date que l’employeur peut mettre en place un système de vidéosurveillance au sein de son entreprise (Cass. soc. 20-11-1991 n o 88-43.120 : RJS 1/92 n o 1), le contournement (voire le détournement) des règles à observer peut être lourd de conséquences, comme on le verra par la suite (n o 22).
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Ainsi, comme le juge régulièrement la Cour de cassation , si l’employeur peut surveiller l’activité de ses salariés et les sanctionner, il ne peut pas le faire par des procédés qui n’ont pas été portés préalablement à leur connaissance, ni procéder à une surveillance illicite. Et conformément à la loi « informatique et libertés » , en cas de traitement de données à caractère personnel recueillies au moyen d’un dispositif de contrôle, les données collectées doivent l’être « de façon adéquate, pertinente, non excessive et strictement nécessaire à l’objectif poursuivi ».
La Commission nationale informatique et libertés ( Cnil ), garante de la bonne application de la loi « informatique et libertés », est l’acteur majeur de protection des droits fondamentaux des salariés dans le monde professionnel numérique : outre un rôle de conseil, elle opère des contrôles du respect de cette loi, qui aboutissent parfois à des sanctions pécuniaires.
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C’est tout l’intérêt de la décision du Conseil d’Etat du 18 novembre 2015 (CE 18-11-2015 n o 371196 : FRS 25/15 [ 4 ] p. 7) qui vient rappeler les règles principales à observer pour que la vidéosurveillance en entreprise évite la censure de la Cnil.
C’est tout l’intérêt de la décision du Conseil d’Etat du 18 novembre 2015 (CE 18-11-2015 n o 371196 : FRS 25/15 [ 4 ] p. 7) qui vient rappeler les règles principales à observer pour que la vidéosurveillance en entreprise évite la censure de la Cnil.
Profitant d’une espèce dans laquelle la Cnil avait sanctionné pécuniairement l’employeur d’une « amende » de 10 000 euros (situation de plus en plus fréquente si l’on en croit ses statistiques les plus récentes), le Conseil d’Etat invite les entreprises à édicter
un dispositif légitime et proportionné au but poursuivi (1 re exigence) ; rappelle que celui-ci doit avoir été porté à la connaissance des salariés et des représentants du personnel (2 e exigence) ; et exige enfin que les données récoltées soient sécurisées (3 e
exigence).